Leçon 5 : La Guerre froide : conflit idéologique, conflit de
puissance
Pourquoi
l’alliance entre l’URSS et les puissances anglo-saxonnes éclate-t-elle après la
victoire sur le nazisme ?
La Guerre froide ou en
anglais « Cold War » est définie en 1947 par des journalistes
américains dont Walter LIPPMANN. Les conflits majeurs opposent les deux
Blocs : 2 groupes de pays opposés avec à la tête de chaque bloc une superpuissance.
Cette guerre a duré 45 ans de 1947 à 1991 mais certains la date dès 1917. Les
principaux combats qui ont eu lieu pendant la Guerre froide sont celles de
Corée (50-53), du Vietnam (64-73) et d’Afghanistan (79-88). La Guerre froide
est à la fois un conflit classique (entre puissances qui veulent étendre
leur influence) et idéologique avec deux idéologies qui
s’opposent : le « Free World » américain et l’idée universelle,
internationaliste et anti-impérialiste russe. Cette guerre passe par
l’utilisation d’instruments : avec une lutte politique (Propagande,
services de renseignements, opérations spéciales), avec une course aux
armements (bombes atomiques…) et avec une compétition dans différents domaines
(les sciences, l’espace, le sport…)
I)
La naissance d’un monde bipolaire
qui entraîne une compétition tous azimuts entre les deux blocs… :
A)
Des origines de la guerre froide
… :
Deux superpuissances sont issues
de la Seconde Guerre mondiale,
elles sont rivales et dotées de larges zones d’influences. Les Etats-Unis, à la
tête du « monde libre », défendent les valeurs du capitalisme et du
libéralisme auxquelles l’URSS oppose un communisme à vocation universelle.
Après
1947, cette opposition s’exacerbe. L’URSS
stalinienne impose des régimes communistes dans les Etats qu’elle a libérés
et qu’elle occupe. Ces démocraties populaires,
à l’est du « rideau de fer » forment ainsi le « camp
socialiste ». Pour contenir ce mouvement, le président des Etats-Unis Harry Truman élabore la doctrine du containment (ou en français
« endiguement ») et propose une aide économique à l’Europe : le plan Marshall. L’URSS réplique par la
doctrine Jdanov (idéologue du PCUS) qui entérine une bipolarisation (division du
monde en deux blocs dirigés par les U-S et par l’URSS) du monde et crée le Kominform
(organisation de liaison des parties communiste de l’Est comme de l’Ouest pour
coordonner leur action sous l’égide et au profit de l’URSS). Deux blocs
antagonistes se mettent ainsi en place.
B)
… à un conflit à la fois
idéologique et de puissance …
Les
U-S lancent très vite une « pactomanie » avec John Foster DULLES et plusieurs traités d’alliances sont signés
dont l’Organisation de l’Alliance Atlantique ou OTAN en 1949 qui permet à l’Europe d’être protégée par les U-S. Les
soviétiques réagissent en créant le Comecon
ou CAEM et le Pacte de Varsovie (1955) qui lie les
armées des démocraties populaires entre elles.
Désormais
les deux blocs sont face à face sur le plan idéologique (Démocraties libérales ≠ Démocraties populaires), économique (Plan Marshall ≠ CAEM) et militaire (OTAN ≠ pacte de Varsovie)
voire même au niveau des services
secrets (CIA : Central Intelligence Agency en 1947 ≠ KGB qui était
NKVD jusqu’en 1954).
Les
deux grands vont s’affronter dans plusieurs domaines :
-
Course aux armements conventionnels (armes,
avions, chars) et nucléaires (Bombe A : 1945 pour les U-S, puis 1949 pour
l’URSS ; Bombe H : 1949 pour les U-S, puis 1954 pour l’URSS). L’équilibre de la terreur est instauré à
partir de 1949 après l’acquisition des russes de l’arme nucléaire et Churchill
dira que « la sécurité est fille de la terreur ».
-
Course à l’espace : En 1957 les soviétiques
envoient le 1er satellite dans l’espace :
« Spoutnik ». En 1961, Youri
Gagarine est le 1er homme à aller dans l’espace. D7S 1959,
Eisenhower crée la NASA et en 1961, Kennedy lance le programme APOLLO pour
atteindre la Lune, ce qui est acquis en juillet 1969 par Neil Armstrong, au total 12 américains sont allés sur la Lune.
-
Compétition dans le sport : Le sport devient un enjeu
essentiel de prestige lorsque les Soviétiques participent pour la première fois
aux J-O d’Helsinki en 1952. En 1980, les
américains boycottent les J-O de Moscou, tout comme les russes qui boycotteront
ceux de L-A 4 ans plus tard.
-
Opposition dans la propagande : Réalisme soviétique
s’oppose à l’American way of life
prôné par Hollywood.
-
Chasse aux adversaires : Aux U-S, la peur de
l’URSS qui se présente comme un pays pacifiste et qui dispose d’un puissant
relais communiste en Europe, se transforme en une véritable psychose anticommunisme qui naît alors aux U-S et aboutit
à la « chasse aux sorcières »
conduite par le sénateur Joseph McCarthy.
En URSS et dans les « Pays frères »
ou « satellites » ont lieu
des procès truqués qui aboutissent à de grandes
Purges.
C)
… qui n’est pas figé dans le
temps et connaît plusieurs phases :
-
La Guerre froide « chaude » (1947-1953) qui s’achève avec l’élection du
président américain EISENHOWER et la mort de Staline le 5 mars 1953 et avec le
règlement en 54-55 de l’occupation de l’Autriche.
-
La coexistence pacifique : (1953-1962) : avec
le voyage du secrétaire général du PCUS, KHROUCHTCHEV aux U-S (ce voyage est un
succès)
-
La détente (1962-1975) : avec
l’amélioration des relations Est/Ouest qui passe par le téléphone rouge qui relie directement Washington au Kremlin en juin
1963 et en 1972, les 2 pays signent les accords SALT I (Strategic Arms
Limitation Talks).
-
La Guerre « fraîche » (1975-1985) : avec des tensions qui renaissent
et avec l’affaiblissement des U-S (avec la guerre du Vietnam, le Watergate et
le dollar qui n’est plus « as good as gold ») qui font profiter les Russes
qui installent en Europe de l’Est des missiles moyenne portée « SS
20 ». En 1983 REAGAN réagira en mettant des missiles « CRUISE »
et « Pershing » en Europe de l’Ouest. Cela donne lieu à la crise des Euromissiles en 1983 qui est
en moment anxiogène et paroxismique.
-
(1985-1989) :
avec l’arrivée au pouvoir de Mikhaïl
GORBATCHEV, l’effondrement de l’URSS et la victoire de REAGAN et de G. BUSH
père.
ð La fin de la Seconde Guerre
mondiale marque le passage vers une autre organisation du monde basée sur de nouveaux
rapports de force. Tandis qu’un nouvel
ordre mondial se construit selon les vues américaines, la carte de l’Europe est redessinée au
profit de l’URSS qui profite des avancées de l’armée rouge et la division en
zones d’influence s’impose dans les faits. Alliés
de circonstance contre le Reich allemand, URSS et U-S, auréolés tous les
deux de leur victoire contre les puissances de l’Axe, vont bientôt s’affronter,
car ces deux Etats se définissent comme des messianismes à prétention planétaire, des universalismes, vitrines
d’un modèle de société avec leurs propres valeurs et des conceptions
opposées sur les rapports entre Etat, société et économie.
II)
… et dans lequel trois lieux
symbolisent toutes les tensions qui pèsent alors sur le monde
A)
D’abord Berlin et l’Allemagne de
1948 à 1989… :
En
1945, l’Allemagne, Berlin, l’Autriche et Vienne sont divisés en, 4 zones
occupées par 4 puissances vainqueurs de l’Axe. Ces pays ont perdu totalement
leur souveraineté et ils sont dirigés par le conseil militaire. Peu à peu la
situation se détériore car Américains et Russes ne voient par l’avenir de
l’Allemagne de la même façon. Ce qui va provoquer petit à petit la rupture.
En
1946, les zones américaines et anglaises fusionnent et deviennent la Bizone.
En
1947, les Français rejoignent la Bizone qui devient Trizone.
En
mai 1948, la Trizone décide de créer une nouvelle monnaie : le Deutsch-Mark.
En
juin 1948, Staline se lance dans le Blocus
de Berlin-Ouest avec la fermeture de
tous les axes de communications vers Berlin-Ouest.
Dès
lors, les U-S et la G-B lancent un pont
aérien pour ravitailler la ville et cette parade réussit.
En
mai 1949, après 322 jours de Blocus, Staline met fin à celui-ci et admet donc
que Berlin-Ouest, épine au sein de l’occupation soviétique, reste occidentale.
Peu après, la RFA (République
Fédérale d’Allemagne ou en allemand : BRD : BundesRepublik Deutschland)
naît à l’Ouest avec comme capitale Bonn et en octobre 1949 naît la RDA (République Démocratique
d’Allemagne ou en allemand : DDR : Deutsche Demokratische Republik).
Ce ont deux pays frères ennemis qui ne se reconnaissent pas encore et sont hors
de l’ONU.
En
août 1961, les autorités est-allemandes estiment que qui Berlin-Ouest est une menace à l’intégrité de la RDA. Elles décident alors avec le
soutien de l’URSS de construire, autour de Berlin-Ouest, un mur de 4 m de haut
et gardé par des VOPOS. En réalité, le motif de la construction du mur de Berlin est la forte émigration qui a eu lieu entre 1948 et
1961 à Berlin-Est d’où sont partis près de 3 millions d’allemands.
En
1963, John Fitzgerald Kennedy, le président des U-S est en voyage à Berlin-Ouest,
durant lequel il s’écrie : « Ich
bin ein Berliner » et met en avant la démocratie qui existe à l’ouest
et condamne la dictature qui existe à l’Est. Si le « Rideau de fer » qui sépare les pays occidentaux des pays de
l’Est, reste un concept, le mur de Berlin (août 1961 – novembre 1989) est bien
une réalté de la division Est-Ouest. Berlin-Ouest devient donc une vitrine et
un lieu de propagande pour les occidentaux.
Dans
la nuit du 9 au 10 novembre 1989 le
mur de Berlin tombe pour plusieurs raisons :
Gorbatchev
a mis fin à la politique de souveraineté
limitée en 1987. Lors d’un voyage en octobre 1989 en RDA durant lequel a
lieu le « baiser de la mort »
entre Gorbatchev et HONECKER le président allemand. Le 9 novembre 1989 une
conférence de presse retranscrite à la télé a lieu et le représentant du
gouvernement est interrogé et ne sait quoi répondre, peu après plusieurs milliers de Berlinois de l'Est
se pressent aux points de passage et exigent de passer. Sans ordre concret ni
consigne mais sous la pression de la foule, les Vopos ne tirent pas et vers 23
heures, le mur commence à tomber et près de 2,5 millions d’Allemands se rendent
à l’Ouest mais le mur est symboliquement tombé.
Le 3
octobre 1990, à la suite du traité 4 + 2 (qui regroupe les U-S, la G-B, la Fr,
l’URSS + la RFA et la RDA) l’Allemagne se réunifie. La RFA d’Helmut FOHL
absorbe la RDA et Berlin redevient la capitale de l’llemagne. Mais cette
réunification cache des inégalités économiques Est-Ouest très grandes, elle
coûte chère au budget allemand et une nostalgie demeure entre Ossies et
Wessies.
ð L’Allemagne et Berlin sont un des
symboles de la Guerre froide car ils ont été un des grands enjeux de cette
guerre, ils ont été des jouets pour les 2 Grands et ces 2 Grands ont testé la Resistance et la Détermination de l’autre sans aller jusqu’au conflit ouvert entre
les 2 superpuissances.
B)
… ensuite la crise des missiles à
Cuba en 1962 … :
Cuba
est une île des Caraïbes et une ancienne colonie espagnol jusqu’en 1898. Cuba
entre dans la sphère d’influence américaine.
En
1959, la guérilla conduite par Fidel
Castro (un avocat cubain nationaliste) et Ernesto dit « CHE »
GUEVARA (un médecin argentin communiste) a reversé le régime proaméricain
du dictateur Fulgencio Batista. Les
Etats-Unis mettent en place un embargo
sur le sucre de l’île, mais les Russes acceptent d’acheter le sucre cubain. En
1961, ils soutiennent un débarquement
d’exilés cubains dans la " baie des cochons ". Cette tentative
échoue et persuade Castro de se rapprocher de l’URSS. Il accepte que les
Soviétiques installent des missiles nucléaires à Cuba. Khrouchtchev est
persuadé que le président John F. Kennedy ne réagira pas.
Le
14 octobre 1962, un avion espion U2 photographie les rampes de missiles en
construction sur Cuba. L’île est située à 150 km de la Floride, et la portée
des missiles menace toutes les villes de la côte Ouest des Etats-Unis, y
compris New-York et Washington. Cet événement va engager la crise de 13 jours entre le 16 et le 28
octobre 1962
Le
22 octobre, Kennedy s’adresse aux Américains dans un discours radiotélévisé
dans lequel il explique la situation. Il ordonne un blocus maritime. La flotte de guerre américaine prend position
autour de Cuba.
Fidel
Castro est favorable à une attaque nucléaire contre les Etats-Unis, mais Khrouchtchev, conscient des
conséquences possibles d’une " guerre d’anéantissement ", choisit de retirer les missiles de Cuba
à la fin du mois d’octobre, en échange d’une promesse des Etats-Unis de ne pas
envahir l’île. Les Américains retirent également leurs missiles installés en
Turquie.
ð Si les deux camps médiatisent
l’issue de la crise comme une défaite du camp adverse, la crise de Cuba est souvent
interprétée comme un échec de Khrouchtchev face à la fermeté du président
Kennedy. Cependant, cette interprétation est à relativiser : les Etats-Unis ne
parviennent pas à empêcher le maintien d’un régime communiste à Cuba, qui
multipliera les guérillas castristes en Amérique latine et même en Afrique. La
crise entraîne une reprise des négociations destinées à éviter un conflit
nucléaire dans le cadre de la dissuasion. Le « téléphone rouge », une liaison directe entre la Maison Blanche
et le Kremlin, devient le symbole de cette nouvelle période et en 1963, le
traité de Moscou interdit les essais nucléaires dans l’atmosphère. La Détente
se poursuit jusqu’au milieu des années 1970.
C)
… et enfin la guerre du Vietnam
(1964 – 1973)
En
1945 le Vietnam fait partie de l’Indochine française depuis la fin du XIXème
siècle.
Entre
1941 et 1945, le pays est occupé par les Japonais.
En
août 1945, les Japonais sont battus et quittent le pays.
Le
1er septembre 1945, Ho Chi Minh proclame l’Indépendance du Vietnam.
Le général Leclerc part en Indochine avec un contingent militaire pour rétablir
la présence française. Les négociations finissent par échouer et en novembre
1946, la Guerre d’Indépendance
commence. Elle se terminera en 1954 par la défaite de Dien-Bien-Phu. Les
accords de Genève mettront fin à la guerre et deux Vietnam se créent :
-
Au
Nord un Vietnam communiste contrôlé par Ho Chi Minh.
-
Au
Sud un gouvernement pro-occidental.
Dès
le début des années 1960, les Etats-Unis envoient des conseillers militaires
pour contrer la guérilla communiste qui se développe au Sud Vietnam. En 1964,
le président Johnson, influencé par la " théorie des dominos ",
décide de renforcer l’engagement des Etats-Unis pour soutenir l’armée
sud-vietnamienne contre les Viêt-Cong, armés par la Chine et l’URSS. Il obtient
du Congrès l’adoption de " la résolution du Golfe du Tonkin ". A la
fin des années 1960, près de 600 000 soldats américains combattent au Vietnam.
L’armée
américaine dispose d’une supériorité technologique et matérielle : aviation, bombardements, utilisation du napalm et de
produits chimiques comme « l’agent orange », hélicoptères, appui
naval, etc. Mais elle se heurte à une guérilla très mobile, approvisionnée en
armes par la « piste Hô Chi Minh » et les conditions de combats sont
très difficiles.
En
1968, l’offensive communiste du Têt bouscule les positions américaines.
Les
stratèges américains sont persuadés que la guerre ne peut être gagnée, alors
que des mouvements de protestation contre la guerre éclatent dans tous les Etats-Unis.
Richard
Nixon, élu Président en 1968, poursuit la politique de désengagement américain
ébauchée par Johnson à la fin de son mandat et commence alors la « vietnamisation » du conflit,
c’est-à-dire le retrait petit à petit des troupes au Vietnam.
En
1973, les accords de Paris
entérinent le retrait militaire américain et met fin peu à peu à la guerre.
Malgré les accords de paix, la guerre se poursuit entre nord et
sud-vietnamiens.
En
1975, le Viêt-Cong entre dans Saigon, rapidement rebaptisée Hô-Chi-Minh-Ville
et l’ensemble du Vietnam est unifié sous un régime communiste. La même année, le
Laos et le Cambodge voisins basculent également dans le camp communiste.
Bilan :
La
guerre du Vietnam est un conflit
meurtrier, elle a fait plus de deux
millions de morts, dont 52 000 soldats américains.
C’est
un conflit asymétrique et en même
temps symbolique entre un des deux
grands (U-S) et un pays du sud (Vietnam) soutenu par, plus ou moins directement
l’autre Grand. Mais qui n’a jamais opposé directement des soldats américains et
soviétiques. Cette guerre montre également les limites de l’efficacité des
superpuissances lorsqu’elles mènent des guerres conventionnelles dans des
conditions qu’elles ne maîtrisent pas.
Cet
échec entraîne un certain retrait des Etats-Unis de la scène internationale
jusqu’au début des années 1980. Il s’inscrit dans la période qui marque la fin
de la Détente et le début de la « guerre fraîche », caractérisé par
une poussée communiste en Asie et en Afrique. L’Amérique doute de sa puissance
: en cela, la guerre du Vietnam représente un tournant dans la guerre froide.
Elle
a été largement médiatisée et marque une nouvelle étape dans l’affrontement idéologique qui
caractérise la guerre froide.
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